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ASSEMBLÉE NATIONALE : ENTENTE DÉLICTUEUSE AVEC LE GOUVERNEMENT

La deuxième session ordinaire de l’Assemblé nationale pour l’année 2019 s’est ouverte le 10 juin à Yaoundé, marquée par le discours d’ouverture du président de la Chambre, Cavaye Yeguie Djibril. Ce dernier a donné l’allure de ce à quoi va ressembler cette session et ce qu’il faudra en attendre, c’est-à-dire rien. Dans son discours d’ouverture en effet, là où on se serait attendu à ce que le président de l’Assemblée interpelle directement le gouvernement sur les différentes crises actuelles, et s’inquiète de la tournure que prennent les évènements, il s’est plutôt montré solidaire.

D’après lui « le fait est désormais avéré : le Cameroun est l’objet d’une conspiration à l’effet de déstabiliser le pays. Pour justifier leur ingérence, les conspirateurs prétendent dénoncer le système politique camerounais qui serait d’après eux, réfractaire au dialogue. Un système qui aurait consacré l’impunité et la violation des droits de l’homme. Un autre créneau des pourfendeurs du Cameroun, est la gestion par Yaoundé des déplacés internes et des réfugiés, une gestion qui selon eux serait un désastre humain. Malheureusement, toutes ces allégations manquent de fondement, des incongruités que l’Assemblée nationale dénonce et condamne avec la dernière énergie. »

                                  Dion Ngute (Pm) et Cavaye Yeguié (Pan): Complices contre le peuple?

Caisse de résonance

Ce discours n’est en effet autre chose que la reprise des propos des ministres du gouvernement, René Sadi de la Communication, Atanga Nji de l’Administration territoriale, Lejeune Mbella des Relations extérieures notamment, pour qui tout le malheur du Cameroun viendrait de l’extérieur où des ennemies sont tapis dans l’ombre. Ainsi l’Assemblée nationale et le gouvernement sont unanimes sur le fait que ce sont les ennemies de l’extérieur qui ont violenté en octobre 2016 les avocats anglophones, les enseignants et les étudiants de l’université de Buéa. C’est de l’extérieur que les arrêtés sont signés pour interdire systématiquement les manifestations publiques pourtant garantis par la Constitution, étouffant ainsi un peuple qui ne demande qu’à exprimer son ras le bol face à des conditions de vie qui se dégradent chaque jour.

C’est de l’extérieur que l’on vient réprimander violement des Camerounais dans la rue au cours des marches, lancer des bombes lacrymogènes, procéder à des arrestations, infliger des traitements inhumains à ceux dont le malheur est d’avoir une opinion contraire, traduire les civils devant les tribunaux militaires, ce sont les ennemis extérieurs qui gagnent des travaux publics, creusent les routes et les abandonnent, laissant les populations riveraines dans des conditions pires qu’avant et ce pendant des années sans que cela n’émeuve personne. Ce sont ces mêmes ennemies de l’extérieur qui ont installé un vaste trafic dans la gestion des projets de la Coupe d’Afrique des Nations 2019, avec des camions de sable facturées à 700 000 Fcfa et des ouvriers constamment en grève dans les différents chantiers, ce qui a conduit au retrait de l’organisation, toujours ces mêmes ennemies empêchent depuis 1996 que l’article 66 de la Constitution sur la déclaration des biens ne soit mise en application, les mêmes qui refusent depuis des années de réviser le Code électoral qui empêchent les jeunes de 18 ans de participer au vote, pour ne prendre que ces quelques cas.

Entente délictueuse

Le simple fait que l’Assemblée nationale soit d’accord avec le gouvernement est la preuve que la démocratie ne fonctionne pas. Le rôle du Parlement n’étant pas d’accompagner le gouvernement, mais justement de le contrôler, c’est-à-dire questionner ses actions, demander des comptes et ouvrir des enquêtes en cas de besoin. Ce qui se passe en ce moment n’est rien d’autre qu’un complot contre le peuple. Un peuple qui se sent désormais trahi par ceux-là, les députés à qui il a donné le pouvoir législatif pour avoir un œil sur les politiques que mène le gouvernement et s’assurer que ses intérêts sont sauvegardés, mais qui sont allés prendre langue avec ce même gouvernement avec lequel il parle désormais le même langage et mange à la même table.

Ils ont été choisis pour aller proposer des lois permettant d’améliorer les conditions de vie à la base, mais ils sont allés juste prendre l’écharpe, se trouver quelques postes dans le bureau de l’Assemblée, s’assurer d’avoir un sauf conduit pour entrer dans tous les couloirs, ensuite ils se sont mis à applaudir toutes les propositions de loi introduites par le gouvernement au lieu de les scruter minutieusement et les rejeter quand elles ne répondent pas aux aspirations du peuple. La chambre de proposition et de contrôle est ainsi devenue une simple chambre d’enregistrement, dont le rôle se limité désormais à faire l’écho du son émis par le gouvernement, ils ont transformé leur rôle de contrôle de l’action gouvernemental en rôle d’accompagnement de l’action gouvernemental, face à un peuple qui souffre dans la chair.

Un peuple qui a heureusement la possibilité de  dire son mécontentement à ces députés de la 9eme législature d’ici peu en leur retirant leur confiance. Si les textes sont respectés, cette session sera la dernière pour les députés actuels.Leur mandat s’achevant le 29 octobre 2019, le corps électoral pour l’élection des députés à l’Assemblée devra être convoqué au plus tard le 18 juin 2019, dans 7 jours exactement, conformément à l’article 86 alinéa 2 du code électoral, qui dit que « l’intervalle entre la publication du décret convoquant le corps électoral et la date fixée pour le scrutin est de 90 jours au moins. »

Roland TSAPI

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